Guy Hillion

Et bien que courtisé cet été par Manchester City, Hambourg, Monaco, d'autres clubs, le Costarmoricain s'est à nouveau engagé à Chelsea. Entretien...

Un mot sur votre « deuxième vie » au FC Nantes-Atlantique comme directeur sportif...

J'aurais dû mieux formaliser mon rôle et mes prérogatives sur le contrat. Mais je n'étais sans doute pas fait pour travailler avec la famille Kita, et réciproquement.

Le FCNA reste le club de votre coeur : y retournerez-vous un jour ?

Il ne faut jamais dire « jamais » mais je pense que je finirai à Chelsea.

Pourquoi Chelsea justement ?

J'ai connu Nantes et Bordeaux, deux clubs extraordinaires et exemplaires, où j'ai passé des années inoubliables, mais Chelsea est fabuleux ! Il faut bien comprendre que chez les Anglais, la cellule de recrutement des jeunes a une importance essentielle, à l'inverse de la France où nous sommes souvent considérés comme la 5e roue du carrosse. À Chelsea, où les infrastructures sont exceptionnelles avec 18 terrains en herbe et l'Academy en plein coeur du village-club, tout est pensé autour de cette cellule. Les dirigeants se donnent les moyens et le temps pour réussir : sérieux, réactifs, organisés, exigeants, patients...

C'est-à-dire ?

Par exemple, avant de faire signer un jeune, le club n'hésite pas à faire une enquête très fouillée sur ce jeune : sa mentalité, son environnement familial, sa culture, son voisinage, ses amis, l'historique de ses blessures, ses statistiques en compétition... Ils demandent même s'il a un animal de compagnie ! Les Anglais prennent leur temps car ils font un investissement pour l'avenir. En France, on se précipite parce qu'on est plus attiré par la valeur du moment, d'où un plus grand risque d'erreur. Il faut dire aussi que cela est dû en grande partie au fonctionnement différent des compétitions pour les jeunes Outre-Manche. Chez nous, les championnats U15, U17, U 19 obligent les clubs à recruter pour leur centre de formation une quinzaine de jeunes chaque année alors que Chelsea en recrute seulement un à l'étranger par an. Enfin, lorsqu'ils veulent vraiment faire signer un jeune, les Anglais mettent aussi la monnaie sur la table.

Quel est votre champ d'action ?

La France et l'Afrique.

Le rôle des parents dans une signature ?

De moins en moins important. Aujourd'hui, un jeune de 15 ans, s'il est bon, possède déjà son agent. Et là aussi, il y a de bons agents et des mauvais. J'ai beaucoup de respect pour ceux qui travaillent dans les règles.

Les critères de recrutement évoluent-ils ?

Pas vraiment. À Chelsea, la philosophie est la même que celle de Nantes : d'abord le talent, c'est-à-dire la technique et la vitesse, puis l'intelligence de jeu et enfin les aptitudes athlétiques.

Vous évoluez dans un milieu où la concurrence est rude !

Oui, mais il faut savoir être ami avec la concurrence. Voilà 18 ans que je fais ce métier et mon carnet d'adresses est bien rempli. Même si je reste à la maison je suis très bien informé. Vous savez, nous nous retrouvons souvent autour des mêmes terrains pour superviser les mêmes gamins. Nous nous connaissons donc tous et il nous arrive même d'échanger nos points de vue. Il existe un bon esprit entre nous, un peu comme une confrérie.

Pour un recruteur, le risque de ne pas se tromper existe-t-il ?

Non bien sûr. N'oublions pas que nous gérons de l'humain. Je dirai même que lorsqu'un club recrute 15 jeunes la même saison, il est obligé de se tromper ! Et de beaucoup. Ce que l'on recherche, ce n'est pas un bon jeune, ni même un très bon, ni un super. C'est un phénomène !